Le bestiaire, appelé aussi "livre des natures des animaux", vise avant tout à enseigner une morale chrétienne simple. Reprenant la tradition du
Physiologus, les bestiaires prêtent aux animaux des personnalités et des sentiments comparables à ceux des hommes, afin qu’ils servent d’exemples pour illustrer les sermons.
Les bestiaires sont construits sur l’idée qu’il existe, comme le raconte la Genèse, un rapport hiérarchique entre toutes les créatures de Dieu, et que l’Homme en occupe le sommet : dans sa célèbre
Consolation de Philosophie, l’un des textes les plus lus au Moyen Âge , Boèce compare ainsi les hommes qui se sont éloignés du Bien aux animaux.
Les bestiaires apparaissent en Angleterre au XIIe siècle, à destination du monde aristocratique. Puis ils se répandent dans le Nord de la France et en Normandie. Les Bestiaires en latin sont destinés aux clercs ; les Bestiaires en français aux laïcs. De nombreux écrivains se sont emparés du genre pour créer des bestiaires spirituels, philosophiques, ou courtois.
Le plus ancien bestiaire en français est celui de Philippe de Thaon (vers 1120). A côté des compilations en latin directement issues du
Physiologus, le
Bestiaire divin de Guillaume le Clerc, celui de Gervaise (vers 1150), le
Bestiaire en latin de Pierre de Beauvais (avant 1218) et sa traduction en français, le
De animalibus d’Albert le Grand (1260) sont les principaux représentants de ce genre à finalité didactique et morale.
Parodie courtoise du bestiaire moralisé, le
Bestiaire d’Amour de Richard de Fournival (vers 1250) marque la fin du genre.
Les bestiaires latins commencent toujours par les bêtes sauvages et particulièrement le lion. Viennent ensuite les animaux domestiques, puis les petites bêtes - fourmis, oiseaux, insectes, monstres et vers.
Tout en commençant généralement par le lion, les bestiaires français entremêlent les catégories d’animaux pour construire un Bestiaire du Christ.
Les manuscrits sont illustrés, et leur iconographie obéit à des codes précis. Le nom de l’animal est prolongé à la fois par une description des ses principales caractéristiques, et par une représentation figurée car, selon Richard de Fournival, "La mémoire a deux portes, la vue et l’ouïe ; et chacune ouvre sur un chemin qui y conduit, la peinture et la parole".